«PHOBIE SCOLAIRE», «ANXIÉTÉ SCOLAIRE», «REFUS SCOLAIRE ANXIEUX», «PEUR DE L’ÉCOLE» SONT AUTANT DE TERMES QUI REVÊTENT LES MÊMES MANIFESTATIONS: MAUX DE TÊTE INVALIDANTS, MAUX DE VENTRE, SYMPTÔMES CONDUISANT L’ENFANT À ÉVITER SYSTÉMATIQUEMENT DE SE CONFRONTER AU MILIEU SCOLAIRE. COMMENT DÉCODER LES SIGNES D’ÉVITEMENT ET RÉHABILITER LES APPRENTISSAGES?
Lieu de socialisation et incubateur d’apprentissages, l’école n’a pas pour vocation de rendre les enfants malheureux. L’épanouissement de la personnalité et la collaboration entre pairs font même partie de beaucoup de programmes scolaires. Certains psychiatres s’accordent à dire que le terme de «Phobie scolaire» n’existe pas, le considérant comme un abus de langage. Quoi qu’il en soit, la phobie scolaire a toujours la même conséquence: l’enfant est malade à l’idée d’aller à l’école! Véritables crises de panique, troubles physiques douloureux, traduisent une profonde angoisse quotidienne. Ces troubles cessent généralement lors des week-ends et vacances scolaires. Le décrochage scolaire guette et la rupture avec le milieu scolaire s’annonce si rien n’est mis en place pour accueillir les peurs de l’enfant. Le message direct est clair: «NON, j’en suis incapable!» Mais au-delà, il existe des causes sous-jacentes, des troubles anxieux d’origines différentes qu’il convient d’apprendre à identifier
L’anxiété de séparation
Étape normale du développement des enfants, qui apparaît vers huit mois, elle se transforme en handicap lorsqu’elle perdure et qu’elle se manifeste régulièrement au moment d’aller à l’école. Plus fréquente chez les élèves de Maternelle, elle persiste parfois chez les adolescents. L’enfant est envahi par des craintes d’accidents ou de maladies qui pourraient toucher ses parents ou ses frères et sœurs, par exemple. Il lui est alors difficile de se concentrer sur ses apprentissages, perdu dans la peur de ne plus revoir ses parents. Certains signes peuvent alerter et doivent être traités s’ils durent plus de quelques semaines:
- Difficulté à aller se coucher, demande de dormir dans le lit parental
- Refus d’aller à l’école ou en camp de vacances
- Refus de dormir chez des amis
- Incapacité à rester seul dans une pièce, comportement «collant»…
- Chez l’adolescent, cette anxiété est souvent niée, mais elle se manifeste par un champ réduit d’activités autonomes ainsi qu’une réticence à quitter la maison.
Lorsque cette anxiété entrave la présence scolaire, l’enfant doit être pris en charge par un spécialiste. Il ne s’agit pas d’éviter l’école, mais de permettre à l’enfant ou à l’adolescent de profiter des enseignements au lieu de souffrir d’éloignement.
Insultes, humiliation et harcèlement
Dans certains cas, la phobie peut se déclencher suite à une agression, des humiliations récurrentes ou des menaces. L’enfant qui vit chaque jour dans un groupe l’humiliant ou le menaçant voit sa vie se transformer en enfer. Or, il passe la majeure partie de ses journées à l’école et son image,
sa confiance en lui et en ses capacités se dégradent chaque jour davantage.
Il n’est pas étonnant qu’il ne puisse plus affronter de telles situations. Au terme de harcèlement scolaire, certains préfèrent celui d’intimidation, mais ces termes désignent le même concept: une violence répétée et volontaire qui revêt des formes diverses, le plus souvent en dehors de la présence des professeurs et des adultes qui encadrent les enfants. Certes, chacun a des souvenirs peu tendres de cours de récréation, de chahuts en classe ou dans les couloirs, mais ce n’est pas une raison pour légitimer la violence qui, on le sait, engendre toujours plus de violence allant jusqu’à convaincre des jeunes qu’ils n’ont plus droit à la vie. Actuellement, un enfant sur dix, en France, et un lycéen sur six, au Luxembourg, est concerné par le harcèlement et les conséquences sont nombreuses:
- Perte de l’estime de soi, de la confiance en soi.
- Désinvestissement scolaire, notes en chute libre
- Redoublement pour éviter de se retrouver dans la même classe que les agresseurs l’année suivante
- Des conséquences physiques et psychologiques pouvant aller jusqu’à la dépression et au suicide
Derrière la phobie scolaire se cache alors un véritable naufrage humain que les adultes ont des difficultés à comprendre. Les signes sont souvent camouflés et les enfants harcelés peu enclins à parler, paralysés d’ajouter le terme de «balance» à leur maigre estime. Il existe aujourd’hui des formations pour détecter les signes du harcèlement s’adressant aux enseignants et au personnel de l’éducation, mais aussi aux parents, car la sécurité de nos enfants est l’affaire de tous. Il s’agit d’y travailler tous ensemble
L’anxiété de performance
Il arrive que cette anxiété, communément appelée «Peur d’échouer» soit à l’origine du comportement phobique. Cette peur d’échouer peut toucher tous types d’élèves des plus performants aux moins performants: confrontés à des difficultés scolaires ou à une pression adulte trop importante, ces enfants en arrivent à ne plus essayer pour ne pas échouer. La peur de décevoir ou de ne pas être à la hauteur envahit le quotidien de l’enfant qui ne se concentre plus sur le plaisir d’apprendre, mais sur les résultats. Certains enfants de 6 ou 7 ans disent qu’il faut bien travailler à l’école sinon ils finiront sous les ponts… Voyez-vous leur peur de l’avenir? Dédramatiser les enjeux et les encourager à prendre du plaisir dans tout acte d’apprentissage est plus qu’important, c’est urgent!
Oui, les phobies scolaires parlent. Elles demandent un dialogue bienveillant avec les enfants pour accueillir leurs peurs sans jugements, mais avec discernement. Un enfant retranché dans la peur est incapable d’apprendre, il ne peut pas être en paix avec lui-même ni avec les autres. «Si nous voulons créer une paix durable, nous devons commencer avec les enfants» Gandhi
Valérie THEVENIAUT